HervE FaYEL, ECRITS > L'EAU DU MIROIR

IL FAUT PENSER A CHANGER L'EAU DU MIROIR

Texte de Marie Laure & Pierre Jaubert de Beaujeu
à l’occasion de l’exposition à la Maison de Pays de Mornant

On ne le voit pas. C’est un tableau qui déménage. Depuis des mois, bien enveloppé dans un tissu clair, il n’est pas visible. De mémoire, il est vu pour la première fois au début des années 2000. Il mesure environ 1 mètre 50 par 1 mètre. Il est peint à l’huile sur un panneau de bois. Il est vert mais ce n’est pas un monochrome. Fayel dit que le vert c’est du gris mais en couleur.

Avec ce vert, il « empaysage » son atelier. Car ce tableau est ce qu’on appelle un «atelier». Comme un paysage, l’atelier est un espace en tension, il est à la fois en surface, en trouées, en vues lointaines et rapprochées.

En surface, c’est la peinture qu’on perçoit, ce sont les traits du pinceau, la couleur, la matière, l’enthousiasme, l’inachèvement, la vitesse supposée du geste. On ne sait pas. On ressent cela.

En trouées, y surgit centrale mais décalée la fenêtre de l'atelier; c’est une ouverture immense, vitale et la lumière aiguë, opaque convoque de nouveau la surface.

En vues, ce sont les sources (dé)voilées, partagées, les sources présentes, passées, à venir, le miroir, une vue de... on ne sait plus (carte postale du Japon ?), des tableaux ébauchés dans le tableau, une figure avalée par le fond, l’inscription d’un texte.

En écritures, à la mine de plomb : le titre du tableau «il faut changer...»,
un poème, des conseils du moine Citrouille-Amère, etc. Autant de pistes, de rencontres et d’horizons.

On ne sait plus ce qui fait surface et ce qui fait trou. L’entrelacement est général, simultané, constitutif de la voie ouverte par la peinture. Fayel dit (il faut le lire !) que la peinture « est lieu », elle n’a pas lieu. Voilà, elle est. [il faut la voir !].
Au-delà de nos mémoires...

En fait, peut-être que le titre exact est :
« penser à changer l’eau du miroir »